maj 2019: d'autres romans de paul Cleave ont paru depuis cet article, toujours aussi intéressants...
Paul Cleave (romans parus en Français)
le 28 juillet 2014.Mais pour Paul Cleave, écrivain néo-zélandais, Christchurch, la 2ème ville de Nouvelle Zélande est un enfer. Au fil de ses romans, il ne cesse de la décrire comme un parangon d'hypocrisie, un ramassis de beaufs la journée qui se transforme en rassemblement de dégénérés violents la nuit. Une ville moins peuplée que Toulouse peut-elle déclencher autant de haine? (Toulouse n'est peut-être pas un bon exemple quand on sait que la première écriture de "Toulouse" racontait la haine et le mépris que Nougaro vouait alors à cette ville.)
Paul Cleave a décidé dans ses romans d'utiliser au maximum le potentiel de son environnement insulaire du bout du monde. La ville de 400 000 habitants y est plus corrompue que Gotham City, les employés de bureau méprisables, les responsables religieux pervers, les policiers paresseux ou corruptibles, la justice prompte à libérer les conducteurs alcooliques récidivistes ou emprisonner les innocents.
Ses propres héros sont minés par la perte de leurs proches, une éducation par un père tueur en série et/ou le manque de reconnaissance qu'ils obtiennent dans leur vie professionnelle.
Cette haine ordinaire, ce cynisme de chaque instant pourraient donner des romans sentencieux ou englués dans la douleur portée par leurs héros mais, au contraire, l'écriture est rapide, à peine moqueuse, descriptive sans peser. Les traductions en français sont efficaces et ne ralentissent pas l'action.
J'ai commencé ma lecture par "Un père idéal" que j'avais trouvé par hasard mais apprécié dès les premières pages : alors qu'il a passé sa jeunesse à prouver qu'être le fils d'un père "tueur en série de prostituées" ne faisait pas de lui un personnage dangereux, Edward va être rattrapé par cette ascendance et se livrer à des actes qu'il n'aura aucun mal à justifier.
Car les héros de Paul Cleave, s'ils se posent des questions, finissent toujours par justifier les horreurs qu'ils commettent.
Ainsi, l'ex-policier de "Nécrologie" qui n'hésite pas à se faire justice lui-même trouve-t il toujours à se justifier, même lorsqu'une de ses victimes apparait par la suite innocente de ce dont il la soupçonnait. Cette histoire est parfois décrite comme "compliquée" mais on peut très bien se laisser faire et apprécier l'écriture et suivre ce détective entre ses tombes qui n'hébergent pas le bon cadavre, le prêtre toujours de bon conseil et les demeurés bizarres qui gravitent autour.
"Un employé modèle" , c'est Joe Middleton, moyen en tout comme l'indique son nom. Un homme moyen qui s'éclate dans son hobby de serial killer dont il est plutôt fier. Si on en a déja vu, des comme-lui dans les séries télé (le technicien de surfaces pas futé que personne ne remarque mais qui remarque tout et s'avère un génie du crime), Paul Cleave en a fait son héros ici et nous le rend bien vivant et suscitant notre empathie.
A préciser qu'on lit ces romans sans soucis de la chronologie de parution : la qualité est là dès le plus ancien et on n'a pas ce regret fréquent de lire un premier roman sans y trouver la force des derniers.En revanche, pour de prochains romans en français, Paul Cleave fera revivre certains de ses personnages...
Peu traduit en français même si on attribue à cet auteur un grand succès en Europe alors qu'il est mesuré dans son pays (comme c'est étonnant!), on a la chance de trouver facilement ces romans en librairie, en bibliothèques de prêt et en Ebook.
Note : La transcription en ebooks est de bonne qualité pour les quelques romans de Paul Cleave traduits en français.
Un père idéal
Résumé: Comptable dans un cabinet d'avocats de Chrischurch, il a tout fait pour oublier et faire oublier ses sombres origines : être le fils d'un serial killer. Mais le jour où sa femme est sauvagement assassinée, c'est vers son père, toujours derrière les barreaux, qu' Edward va se tourner pour prendre conseil. Devra-t-il marcher sur ses traces pour se faire vengeance? L'instinct de tueur est-il héréditaire ? Autant de questions qu'il va devoir affronter durant une semaine qui verra sa vie bien rangée basculerdans le chaos
extraits
"Ma photo est parue pour la première fois dans la presse quand j'avais 9 ans. Chaque journal local du pays l'a publiée, dans la plupart des cas en première page. J'ai même fait la presse internationale. C'était une photo en noir et blanc, un peu floue, mon visage était tournée vers le torse de mon père, il y avait des gens autour de nous. Après ça, on m'a vu à la télé, dans les magasines, dans d'autres journaux encore, toujours la même photo. Je n'avais jamais voulu ça, j'essayais de l'éviter mais je ne pouvais rien y faire."
...
« Je pourrais tuer en ce moment, et si le monstre avait son mot à dire, c’est ce que je ferais. La question est : Pendant combien de temps pourrais-je le faire taire ? Non, attendez-la vraie question est : Est-ce que je peux vraiment le faire taire ? »
...
"La torture est uniquement une question d'équilibre et, en règle générale, elle s'avère être un moyen extrêmement inefficace de soutirer des informations.
Le problème, ce sont les seuils de douleur : infliger en trop, et la victime dira tout ce que vous voulez pour vous faire cesser. Ce qui rend alors ses informations non fiables.
N'en infligez pas assez, et elle continuera de vous résister.
Infliger en beaucoup trop, et c'est le corps qui lâche."
Nécrologie
Résumé : À la suite du décès de sa fille et de sa femme et de la disparition mystérieuse de l'ivrogneassasin, Theodore Tate, un ancien flic, s’est reconverti en détective privé. C’est lui qu’on mandate pour s’occuper d’une banale exhumation, celle du corps d’un directeur de banque dont la veuve est suspectée d’homicide. Là, un glissement de terrain accidentel révèle la présence de trois cadavres immergés dans le lac qui borde le cimetière. S’agit-il de victimes du Boucher,le seriel killer que tout le monde recherche ou bien un autre tueur en série est-il à l’œuvre ?
extraits
"La perception est une chose bizarre. Surtout quand il est question de chance.
Une personne qui survit à un accident d'avion est considérée comme chanceuse. Mais est-elle chanceuse ou malchanceuse de s'être trouvée à bord de ce vol ? La malchance d'être assis dans un avion condamné annule-t-elle la chance d'avoir survécu ?
Je ne comprend pas qu'on puisse avoir de la chance de n'avoir perdu qu'un bras."
"Il y a deux bâches étalées par terre ; sur chacune repose un corps bien habillé dans un état de décomposition plus ou moins avancé. Une tente en toile a été dressée au-dessus pour les protéger des intempéries.
Quelqu'un a tendu autour de la tente un cordon jaune sur lequel sont inscrits les mots "ne pas franchir". Pour dissuader les macchabées de se faire la belle. "
Un employé modèle
Résumé : Joe Middleton contrôle les moindres aspects de son existence. Célibataire, aux petits soins pour sa mère, il travaille comme homme de ménage au commissariat de police. Mais qui est-il vraiment… ? Des meurtres en série se succèdent, jusqu’au jour où un meurtre est commis sur le même mode opératoire que les siens mais, pourtant, Joe ne s’y reconnaît pas…Contrarié par ce coup du sort, il décide de mener sa propre enquête. (éditeur)extraits
"Je ne souffre pas de compulsion à tuer tout le temps. Je ne suis pas un animal. Je ne cours pas partout en me déchargeant d’abus subis dans mon enfance tout en trouvant des excuses pour tuer. […] Je ne suis qu’un type normal. Un Joe moyen. Avec un hobby. Je ne suis pas un psychopathe. Je n’entends pas de voix. Je ne tue pas pour Dieu ou Satan, ou le chien du voisin. Je ne suis même pas religieux. Je tue pour moi. C’est aussi simple que ça. J’aime les femmes et j’aime leur faire des choses qu’elles ne veulent pas me laisser faire. Il doit y avoir 2 ou 3 milliards de femmes sur cette terre. En tuer une par mois, c’est pas grand-chose. C’est juste une question de perspective."
"Personne ne voulait donner un boulot quelqu'un comme moi.
- Quelqu'un comme toi ?
- Tu sais…
- Tu es spécial, Joe, souviens-toi de ça."
"Quand je rentre dans mon appartement, je vois que deux messages m’attendent. Tous deux de ma mère. Je les efface, en me demandant deux choses à la fois. Un : pourquoi est-ce que j’aime tant ma maman ? Et deux : pourquoi je ne peux pas l’effacer aussi rapidement que ses deux messages ?
[...] Je pense à ma mère et à ses perpétuelles questions pour savoir si je suis gay. ... Est-ce que je dois retourner sur mes pas et flinguer ces deux types parce qu'ils m'ont fait me sentir si mal ? ... Que ferait Jésus ? Ce serait plutôt chrétien de ma part de retourner et de les descendre. ..."
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